mardi 7 avril 2020

Retourne-toi





Il n'est rien de pire que la sagesse populaire : "Qui vivra, verra...", "Tel père, tel fils", "En avril, ne te découvre pas d'un fil", "Café bouillu, café foutu", ... Ces dogmes populaires tuent la confiance de l'individu et ruinent son imaginaire. Et voilà que, en plus de ces paroles bien incrustées dans l'esprit ou de ces mots derrière lesquels on n'hésite pas à se voiler, certains aphorismes viennent s'inviter dans notre quotidien en chargeant les murs de leur pesante obscurité.

"Ne te retourne pas, tu pourrais raviver tes blessures"...  c'est ce que pourrait dire un réverbère agoraphobe, lassé que des passants distraits sans cesse ne le percutent ! Faut-il pour autant s'interdire de regarder le passé et est-il plus sûr de l'ignorer ? Raviver ses blessures c'est ne pas les avoir pansées et vivre sur des ruines qui menacent notre équilibre. C'est croire aussi que le présent peut se défaire du passé et que l'avenir peut tout autant l'ignorer.

La vie se conjugue à tous les temps. Si le présent est le tronc d'un arbre et si l'avenir est formé de ses branches, feuilles et fruits, peut-on imaginer que cet arbre résistera à la tempête sans de solides racines ? Le passé n'est pas un refuge, pas plus que ne doit l'être l'avenir, mais sa force est d'avoir été, d'être encore, d'être toujours, quand demain n'est qu'hypothèse ou conjecture.

Alors oui, retourne-toi, retourne même en enfer tel Orphée s'il le faut, revis ton Odyssée,  retraverse le désert, ressens à nouveau la faim, la soif et le froid... et ainsi tu sauras qui tu es et ce que tu as, le chemin que tu as parcouru et les atouts qui pourront t'aider demain.