dimanche 24 novembre 2013

Victor Young Perez

J'ai vu hier le film de Jacques Ouaniche, sorti le 20 novembre 2013, consacré à Victor "Young" Perez.



Ce film est une évocation de la vie du boxeur tunisien Victor "Young" Perez, né à Tunis le 18 octobre 1911 et assassiné par les Nazis à Gliwicze, en Pologne, le 22 janvier 1945.

En octobre 1931, il devient à Paris le plus jeune champion du monde de boxe dans la catégorie "poids mouches". Alternant ensuite succès ou échecs, sa carrière durera une petite décennie.

Il est arrêté à Paris en juin 1943 en raison de sa confession juive, interné au camp de Drancy puis déporté en octobre 1943 au camp de concentration d'Auschwitz III Monowitz-Buna, au sud de la Pologne ; son bras est alors gravé d'une marque indélébile : Victor devient le numéro de matricule 157178. Malgré ses mauvaises conditions de détention, il réussit à survivre et même à s'imposer lors d'un combat de boxe forcé, organisé par le commandant du camp, contre un boxeur allemand de poids lourd pour démontrer la supériorité de la "race aryenne" sur les juifs.

Le 18 janvier 1945, face à l'arrivée imminente des troupes soviétiques à Auschwitz, les autorités du complexe concentrationnaire décident son évacuation, marquant le début du transfert des déportés rescapés vers l'Allemagne, une "marche de la mort" au cours de laquelle beaucoup décèdent dont Victor, épuisé, qui est exécuté par balles à Gliwicze après quatre jours de marche. L'Armée rouge entre à Gliwicze le 24 janvier, quarante-huit heures plus tard.

Sur les mille déportés partis le 7 octobre 1943 de Drancy dans le soixantième convoi ferroviaire organisé en France pour la déportation vers les camps nazis, trente-et-un étaient encore en vie lors de la chute du régime nazi, quelques mois après le décès tragique de Victor. Le nom de Victor "Young" Perez est inscrit sur le monument aux morts en déportation érigé au cimetière juif du Borgel à Tunis.

Tragique destin que celui de ce jeune homme, né en Tunisie, devenu champion en France et mort en Pologne à l'âge de 33 ans. Il nous rappelle que des juifs du Maghreb ont aussi été victimes des Nazis et de leurs complices. Il témoigne par sa souffrance d'une époque innommable et de crimes inédits par leur ampleur, des crimes contre l'humanité puisque, sans doute, il n'y eut pas plus cosmopolite que ces camps nazis où l'on trouvait aussi bien des sommités intellectuelles que d'humbles gens, des artistes et des sportifs, des jeunes et leurs aïeux, des juifs mais aussi des tziganes, des résistants ou encore des homosexuels, autant d'êtres venus de toute l'Europe et même au-delà, comme Victor.

Le sourire d'une photo jaunie est celui d'un mort pour qui nous ne pouvons rien sinon une pensée émue. Veillons au moins sur les vivants, qui ont besoin de nous, de notre mémoire, de notre tolérance et de notre intelligence pour lutter contre tout ce qui ressemble, de près ou de loin, à une atteinte à la dignité humaine.



Portrait dédicacé du boxeur Victor Young Perez
(Collections Musée national du Sport, Paris).