A vrai dire je n’avais pas entendu souvent dire du bien de la ville de Lyon chez moi, pas plus d’ailleurs que de celle de Marseille. C’est sans doute ce qui m’avait poussé à me rendre précisément seul à Marseille puis à Lyon.
J’ai aimé Marseille, plus encore peut-être les îles du Frioul d’ailleurs… mais enfin c’est un bout de Marseille planté au milieu de la Méditerranée. Lyon aussi je l’ai aimée. En fait j’ai aimé ce qu’on m’avait recommandé de ne pas aimer, heureux de cette sorte de sentiment de liberté, de libre appréciation, à travers mon propre regard et non à travers des paroles rapportées.
Je cherche à t’oublier mais cela a été un échec à Marseille alors j’arrive à Lyon avec l’espoir d’avoir l’esprit moins hanté par ton souvenir. Je compte en particulier sur la visite des nombreux vestiges romains de Lyon et de Vienne pour me changer les idées et développer mes connaissances dans ce domaine qui est ma spécialité tout autant que ma passion.
Il ne m’a pas échappé qu’au moment même où j’arrive à Lyon, un avion doit t’avoir ramené à Paris après ton mois de vacances au bled. C’est la première d’une longue série de séparations temporaires, la plus dure certainement car je n’étais absolument pas préparé à ton départ, absolument pas préparé aux élans de mon cœur dans ces circonstances. Ce mois sans toi m’a révélé la force de ce qui me lie à toi, mon Grand Frère… une révélation quelque peu cruelle puisqu’elle s’est faite dans les larmes et la mélancolie.
Finalement, tout comme à Marseille, il m’était bien difficile de t’oublier à Lyon comme je l’avais naïvement espéré. La perspective de ton retour ne faisait même que rendre mes pensées plus pesantes.
J’erre du côté de Fourvière un matin… je viens de voir la charmante fontaine romaine dédiée à l’empereur Claude sur la place de Trion… je viens juste de parvenir jusqu’à la place Eugène-Wernert où trônent cinq mausolées romains dont deux sont particulièrement massifs et majestueux.
C’est là que mon téléphone se met à sonner et je regarde presque assommé ton nom s’inscrire sur l’écran de mon téléphone… comme un rêve en passe de se réaliser mais en lequel je ne parviens pas à croire… il faut dire que mon téléphone n’a pas sonné depuis des semaines car tu es bien l’un des rares à m’appeler alors. Cet appel est une libération pour moi, la fin d’un cauchemar d’un mois où ton ombre m’a suivi pas à pas quelque soit la direction que je prenne.
J’ai toujours gardé en moi ce souvenir, d’autant qu’il y avait ce cadre merveilleux avec les cinq mausolées romains.
Je me souviens que je suis assis là sur ce banc pour te parler… je me souviens que notre conversation dure très longtemps… elle me semble infiniment longue… je me souviens qu’à ce moment là je n’ai plus qu’une idée en tête : rentrer le plus tôt possible à Paris ! Tu me promets alors de venir m’attendre à Paris, à la gare de Lyon, à l’heure où mon TGV doit me ramener vers toi.
Je raccroche, le cœur allégé… Je compte les heures qui me séparent de toi, mon Grand Frère. Elles sont longues ces heures mais mon cœur est à nouveau serein après ton retour de Tunisie et l’assurance de te retrouver pour longtemps.
Je suis repassé avec une collègue à cet endroit au printemps 2006… cela m’a fait un drôle d’effet de revoir ce lieu si chargé de souvenir et d’émotion pour moi. J’ai pris une photo du banc devant l’un des mausolées. Ce banc insignifiant… ce lieu qui ne vous dit rien… c’est un des endroits les plus beaux au monde…