Il y a quelques jours je t’ai appelé pour te souhaiter un bon anniversaire.
Tu as 27 ans, mon petit Frère. Je n’arrive pas à le croire… Il faut dire que tu n’avais que 19 ans quand nous nous sommes rencontrés. Nous fréquentions quelques cours communs à la Sorbonne et une force mystérieuse nous a rapidement rapproché l’un de l’autre.
Tu es le premier être que j’ai aimé comme un frère ; d’autres sont venus ensuite compléter ma famille recomposée mais il est certain que tu as gardé une place de choix dans mon cœur.
Je voudrais te rappeler comment j’ai pris conscience de la force de ce qui m’unissait à toi. J’espère ne pas me tromper dans la succession des événements mais c’est un peu loin quand même !
Cela a commencé un mercredi, au printemps 2000… avant d’entrer dans la salle de cours, tu m’as emmené sur le palier, au bout du couloir, pour te confier à moi. On se connaissait alors un peu mais sans plus et pourtant tu m’as choisi pour parler ; tu m’as expliqué ce jour-là que tu n’allais pas très bien et cela m’a bouleversé.
Nous sommes ensuite entrés en cours. Au bout de quelques minutes, tu te sentais tellement mal que tu as demandé à notre prof si tu pouvais quitter la salle. Elle n’a pas compris ce que tu ressentais et s’est un peu moquée de toi, avec l’humour décapant qu’on lui connaît… j’étais triste de la réaction de notre prof et infiniment dérouté par ton comportement… tu es parti de la salle à toute vitesse et je me suis trouvé terriblement angoissé parce que je ne pouvais pas te suivre, te parler et d’aider, en un moment où tu pouvais faire toutes sortes de choses insensées. J’ai juste eu le temps de te prier de m’appeler au téléphone.
A cette époque, les moyens modernes de communication (internet et téléphone portable) n’étaient pas si répandus que maintenant. Mon numéro de téléphone fixe était le seul fil qui pouvait nous relier alors. J’ai attendu de longs jours ton appel. Mon trouble était profond et je me faisais un grand souci pour toi.
Et puis tu m’as appelé… ce devait être un mardi d’avril ou mai 2000. Tu m’as parlé de ces crises d’angoisse qui t’affectaient, le tout étant lié en particulier à ton déracinement à Paris et à d’autres choses sans aucun doute.
Je crois bien que ce jour-là je t’ai écrit une lettre, ma première lettre pour toi alors que tu venais juste de me donner ton adresse ; toi seul peut te souvenir ce que cette lettre contenait. Ce que je sais c’est que ma mère avait remarqué mon trouble et qu’elle m’avait dit que tu devais avoir beaucoup d’importance pour moi étant donné ma réaction dans cette situation difficile pour toi.
La suite a été plus heureuse. Te souviens-tu de quelques-uns de ces petits moments passés tous les deux ? Le jour où nous étions dans un café de la place de la Sorbonne et où je t’ai demandé d’arrêter de fumer parce que j’avais peur de te voir mourir… le jour où on se cherchait désespérément du côté du métro Bourse, sans téléphone portable, et où on s’est miraculeusement retrouvé (j’étais tellement stressé que je t’ai demandé une cigarette, cigarette que tu as bien fait de me refuser)… nos confidences au bois de Montaigu où on refaisait le monde ensemble (sous la pluie)… ces nombreuses fois où je t’ai fait la surprise d’aller te chercher à la gare (parfois j’y allais pour t’attendre et tu ne venais pas)… ce que tes talents d'informaticien ont fait à plusieurs reprises pour sauver mes ordinateurs… des vers poétiques pour toi (j'essayais d'être poète, comme ton père !)... nos longues promenades dans Paris (parfois sans bien savoir où on allait)… notre café favori, l’un des moins économique du quartier latin (pour satisfaire notre côté non-conformiste)… il y aurait encore beaucoup à dire…
Aujourd’hui, tu vas découvrir ce blog pour la première fois parce que je me suis enfin décidé à te donner l’adresse… cela me fait drôle… cela t’étonnera encore plus… je te souhaite bonne découverte, bonne lecture… et je termine en te disant que je t’aime pour toujours, mon Nono, mon petit nesr.