lundi 28 mai 2007

Sois le bienvenu

Il y a quelques jours je t’ai appelé pour te souhaiter un bon anniversaire.

Tu as 27 ans, mon petit Frère. Je n’arrive pas à le croire… Il faut dire que tu n’avais que 19 ans quand nous nous sommes rencontrés. Nous fréquentions quelques cours communs à la Sorbonne et une force mystérieuse nous a rapidement rapproché l’un de l’autre.

Tu es le premier être que j’ai aimé comme un frère ; d’autres sont venus ensuite compléter ma famille recomposée mais il est certain que tu as gardé une place de choix dans mon cœur.

Je voudrais te rappeler comment j’ai pris conscience de la force de ce qui m’unissait à toi. J’espère ne pas me tromper dans la succession des événements mais c’est un peu loin quand même !

Cela a commencé un mercredi, au printemps 2000… avant d’entrer dans la salle de cours, tu m’as emmené sur le palier, au bout du couloir, pour te confier à moi. On se connaissait alors un peu mais sans plus et pourtant tu m’as choisi pour parler ; tu m’as expliqué ce jour-là que tu n’allais pas très bien et cela m’a bouleversé.

Nous sommes ensuite entrés en cours. Au bout de quelques minutes, tu te sentais tellement mal que tu as demandé à notre prof si tu pouvais quitter la salle. Elle n’a pas compris ce que tu ressentais et s’est un peu moquée de toi, avec l’humour décapant qu’on lui connaît… j’étais triste de la réaction de notre prof et infiniment dérouté par ton comportement… tu es parti de la salle à toute vitesse et je me suis trouvé terriblement angoissé parce que je ne pouvais pas te suivre, te parler et d’aider, en un moment où tu pouvais faire toutes sortes de choses insensées. J’ai juste eu le temps de te prier de m’appeler au téléphone.

A cette époque, les moyens modernes de communication (internet et téléphone portable) n’étaient pas si répandus que maintenant. Mon numéro de téléphone fixe était le seul fil qui pouvait nous relier alors. J’ai attendu de longs jours ton appel. Mon trouble était profond et je me faisais un grand souci pour toi.

Et puis tu m’as appelé… ce devait être un mardi d’avril ou mai 2000. Tu m’as parlé de ces crises d’angoisse qui t’affectaient, le tout étant lié en particulier à ton déracinement à Paris et à d’autres choses sans aucun doute.

Je crois bien que ce jour-là je t’ai écrit une lettre, ma première lettre pour toi alors que tu venais juste de me donner ton adresse ; toi seul peut te souvenir ce que cette lettre contenait. Ce que je sais c’est que ma mère avait remarqué mon trouble et qu’elle m’avait dit que tu devais avoir beaucoup d’importance pour moi étant donné ma réaction dans cette situation difficile pour toi.

La suite a été plus heureuse. Te souviens-tu de quelques-uns de ces petits moments passés tous les deux ? Le jour où nous étions dans un café de la place de la Sorbonne et où je t’ai demandé d’arrêter de fumer parce que j’avais peur de te voir mourir… le jour où on se cherchait désespérément du côté du métro Bourse, sans téléphone portable, et où on s’est miraculeusement retrouvé (j’étais tellement stressé que je t’ai demandé une cigarette, cigarette que tu as bien fait de me refuser)… nos confidences au bois de Montaigu où on refaisait le monde ensemble (sous la pluie)… ces nombreuses fois où je t’ai fait la surprise d’aller te chercher à la gare (parfois j’y allais pour t’attendre et tu ne venais pas)… ce que tes talents d'informaticien ont fait à plusieurs reprises pour sauver mes ordinateurs… des vers poétiques pour toi (j'essayais d'être poète, comme ton père !)... nos longues promenades dans Paris (parfois sans bien savoir où on allait)… notre café favori, l’un des moins économique du quartier latin (pour satisfaire notre côté non-conformiste)… il y aurait encore beaucoup à dire…

Aujourd’hui, tu vas découvrir ce blog pour la première fois parce que je me suis enfin décidé à te donner l’adresse… cela me fait drôle… cela t’étonnera encore plus… je te souhaite bonne découverte, bonne lecture… et je termine en te disant que je t’aime pour toujours, mon Nono, mon petit nesr.

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lundi 21 mai 2007

Si seulement je pouvais lui manquer

Samedi 19 mai… 23h00…

Je regarde mon téléphone comme un idiot… rien… rien depuis mercredi soir…

Je regarde ma boîte mail… rien aujourd’hui… rien depuis vendredi après-midi…

Rien dans la boîte aux lettres aujourd’hui… pas de lettre personnelle depuis des semaines…

Aujourd’hui j’ai eu le bonheur inattendu de « parler » pour la première fois avec un bloggeur que j’aime beaucoup…

Mais je suis malade car mon cœur se vide toujours plus qu’il ne se remplit…

Des chansons à la fois simples, belles et tristes hantent mon esprit…



En remplaçant « père » par « frère », le texte de la chanson suivante décrit étrangement ma vie… une vie où je m’efforce à chaque instant de tendre ma main et de parler à ce frère virtuel dont je recherche sans cesse l’incarnation dans le regard des gens que j’aime.


« Il suffirait simplement
Qu’il m’appelle
Qu’il m’appelle
D’où vient ma vie
Certainement pas du ciel

« Lui raconter mon enfance
Son absence
Tous les jours
Comment briser le silence
Qui l’entoure

« Aussi vrai que de loin
Je lui parle
J’apprends tout seul
A faire mes armes
Aussi vrai qu’j’arrête pas
D’y penser
Si seulement
Je pouvais lui manquer

« Est-ce qu’il va me faire un signe
Manquer d’amour
N’est pas un crime
J’ai qu’une prière à lui adresser
Si seulement
Je pouvais lui manquer

« Je vous dirais simplement
Qu’à part ça
Tout va bien
A part d’un père
Je ne manque de rien
Je vis dans un autre monde
Je m’accroche tous les jours
Je briserai le silence
Qui m’entoure

« Aussi vrai que de loin
Je lui parle
J’apprends tout seul
A faire mes armes
Aussi vrai qu’j’arrête pas
D’y penser
Si seulement
Je pouvais lui manquer

« Est-ce qu’il va me faire un signe
Manquer d’un père
N’est pas un crime
J’ai qu’une prière à lui adresser
Si seulement
Je pouvais lui manquer

« Est-ce qu’il va me faire un signe
Manquer d’un père
N’est pas un crime
J’ai qu’une prière à lui adresser
Si seulement
Je pouvais lui manquer »
[Calogero, « Si seulement je pouvais lui manquer », extrait de l’album Calog3ro, 2004.]

Je pense aussi à toi que j’aime comme un petit frère, toi qui n'as jamais évoqué l’absence de ton père et à qui, par pudeur, je n’ai jamais osé en parler.
Je pense à toi, papa, qui t’es retrouvé rejeté par ton père ; je pense à toi, maman, et à toi, grand-mère, qui avez perdu votre père dans votre enfance ; je pense à vous, mes deux arrière-arrière-grand-parents, qui n’avez jamais connu le nom de votre père.
Toutes ces racines arrachées dans vos vies se retrouvent en moi, arbre fragile en quête de son identité.


 


lundi 14 mai 2007

Premier lustre...

16 mai 2002-16 mai 2007…

Cinq ans…

Premier lustre…

Il y a cinq ans, j’ai rencontré K. Après plusieurs mois d’observation, mélange de curiosité et d’indifférence, nous avons fini par nous parler. C’était entre les deux tours de l’élection présidentielle de 2002, un moment où beaucoup éprouvaient le besoin de se parler pour conjurer un contexte politique délicat ; K. et moi, nous sommes les enfants de cet élan de fraternité.

Le 16 mai 2002, un jeudi, j’ai passé la matinée avec mes étudiants… ce jour là prenait fin ma première année d’enseignement et j’avais bien du mal à accepter cette issue : il n’est pas toujours simple d’avoir le même âge ou presque que ses étudiants et encore moins quand on prend son travail à cœur comme moi et que l’on y ajoute une forte dimension humaine.

Ce jeudi de mai, je me suis retrouvé seul à midi après avoir quitté mes étudiants… j’ai alors pris le train RER jusqu’à Paris et j’ai traîné, à moitié déprimé, sur le boulevard Saint-Michel et dans le secteur de la Sorbonne, ma seconde maison.

Le hasard a fait que tu étais là, mon K. On s’est croisé sur le boulevard Saint-Michel et tu as dû voir que je n’allais pas bien. Tu m’as proposé d’aller dans un café de la place Saint-Michel : le café Saint-Séverin, juste à l’entrée du métro.

Je ne sais plus combien de temps nous sommes restés à la terrasse de ce café… très longtemps en tout cas… plusieurs heures… le serveur est revenu plusieurs fois pour essayer de nous faire commander à nouveau une boisson… cinq ans après, je reste convaincu que ces quelques heures demeurent et demeureront parmi les plus belles de ma vie.

Durant ces quelques heures, il y a eu entre nous une sorte de coup de foudre d’une puissance inouïe, un sentiment qui nous a totalement bouleversé l’un comme l’autre. Avant de nous installer dans ce café nous nous connaissions à peine ; en le quittant, nous étions les meilleurs amis du monde, comme deux frères qui se connaissent parfaitement, depuis toujours. Il n’est certes pas rare que des gens ressentent cela mais il est plus rare qu’ils pensent toujours exactement ainsi cinq longues années après. C’est bien notre cas à tous les deux ; nos sentiments respectifs sont absolument intacts, inaltérés et inaltérables, en dépit de nombreuses épreuves que nous avons traversées telles que tes déprimes amoureuses ou encore nos disputes orageuses qui nous séparaient parfois de longs mois.

A l’évidence, tu as changé ma vie. Sans toi, mon K., je ne serai pas celui que je suis aujourd’hui ; beaucoup de choses appartenant à mon quotidien sont nées ou se sont développées à la suite de notre rencontre, en particulier cette facilité à exprimer mes sentiments dans certaines circonstances ou encore ma façon de me montrer attentif et dévoué aux gens que j’aime. Sans toi, je ne serais pas entre la France et la Tunisie. Tu es à l’origine de certains de mes rêves, de certaines de mes passions ; si tu n’avais pas été là, beaucoup des gens que j’aime ne seraient pas à mes côtés aujourd’hui.

Que dire de plus ? Mon émotion est immense. Je rêve que les cinq prochaines années soient au moins aussi belles pour nous que les cinq écoulées et que tu restes toujours non loin de moi, mon Grand Frère chéri.


Ton petit frère Jawed qui t’admire et qui t’aime pour toujours, avec tendresse et fidélité.

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lundi 7 mai 2007

Mon refuge

Je ne vais pas écrire un poème sur ce lieu que j’aime… mais tout y inspire la poésie… les images, les sons, les odeurs…
Ce lieu c’est le Jardin des Plantes de Paris, intégré au Muséum national d’histoire naturelle et situé en plein cœur de Paris, dans le cinquième arrondissement, coincé entre la Seine, le campus de Jussieu, la grande mosquée de Paris et la gare d’Austerlitz.
C’est un lieu où mon âme et mon cœur trouvent souvent l’apaisement. J’y vais quand j’ai des pensées sombres car je m’y sens comme enveloppé par la nature, en particulier par les arbres, qui en sont la mémoire vivante.
Ce lieu est à la fois immense et minuscule... plus on le connait et plus on regrette qu'il ne soit pas plus grand... on aimerait en repousser les limites à l'infini pour s'y perdre un peu plus encore, pour que ses perspectives semblent se prolonger jusqu'à l'horizon.
Selon la saison, selon la luminosité, selon l’heure de la journée, les couleurs de la terre, des végétaux et du ciel jouent à nous émerveiller par leurs variations et leurs palettes multicolores.
J'aime être seul en ce lieu ; j'aime aussi y être de temps en temps accompagné et c'est arrivé trois ou quatre fois en l’espace d’un an, des moments dont je me souviens bien et qui m'ont fait grand plaisir car ce lieu inspire de belles discussions... ou de beaux silences salués par le frisson des arbres ou le chant des oiseaux.
Aujourd’hui la poésie qui est en moi en pensant à ce lieu, je préfère la restituer à travers mes yeux, à travers quelques photographies que j’ai faites sur place :

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P.S. Ceci est une note enregistrée à l’avance et à parution automatique.