lundi 30 juin 2008

Comme si de rien n’était…


Un sentiment étrange m’envahit depuis trois ou quatre jours… l’impression d’une vie réellement douce, qui s’écoule lentement, à un rythme que je maîtrise plutôt mieux que précédemment… Il y a aussi cette sensation d’instants suspendus dans le présent, sans conscience du passé ni du futur, des heures qui se consument sans que je songe à regarder ma montre.

J’en viens même à douter de l’existence de certains événements du passé proche ; après des années d’appréhension, d’angoisse et de doute, tout semble dispersé en l’espace de quelques heures, ce qui m’apparaît tout à fait irréel.

Oh certes le ciel n’est pas d’un bleu parfait ; il y a même quelques nuages d’une noirceur extrême ; je les défie de mon regard clair pour me convaincre que j’ai une petite chance de pouvoir les maîtriser. Ils sont généralement plus forts que moi, dans un premier temps et ce n’est qu’ensuite que mes défenses immunitaires viennent les tempérer.

Peut-être tout cela vient-il du fait que la semaine écoulée a vu de beaux rêves s’accomplir… ah ah ah… je rigole en moi-même… « la semaine écoulée a vu de beaux rêves s’accomplir »… quel euphémisme, quel minimalisme dans les mots ! Non… c’était à l’évidence la plus belle semaine de ma vie écoulée, l’une de celles dont je suis sûr qu’elle ne s’effacera jamais.

Aujourd’hui j’ai songé à un souvenir d’enfance, un souvenir heureux. Celui d’une musique joyeuse, de paroles d’Amour animées par des créatures insolites qui émerveillaient mes yeux d’enfant, particulièrement les jours de fêtes où cet interlude venait égayer les programmes quelque peu modifiés d’Antenne 2. J’avais complètement oublié les paroles de cette chanson mais leur redécouverte m’apparaît comme un signe d’autant plus plaisant.


lundi 23 juin 2008

Défaite de la musique

Toujours curieux des usages liés à internet, j’ai découvert ces derniers jours – du 17 au 22 juin –, avec un certain étonnement, un pic de consultation – une vingtaine – de mon texte du 18 juin 2007 consacré à la fête de la Musique. Tout comme on ranime la flamme du Soldat Inconnu chaque soir sous l’Arc de Triomphe pour lui réchauffer les doigts de pieds au gaz de ville de plus en plus coûteux, certains textes anciens des blogs refont surface cycliquement par la grâce des circonstances et connaissent ainsi une gloire posthume qui n’est somme toute pas déméritée.


L’intérêt du phénomène réside dans le contenu des requêtes saisies sur divers moteurs de recherche et qui ont conduit à mon texte de l’an passé relatif à la fête de la Musique. On a là une vision instantanée du mode de perception de cette fête de la Musique par certains individus. A côté de ceux qui cherchent tout simplement à se renseigner sur cette fête, on trouve en effet de curieuses demandes.


Quelqu’un demande notamment « où est-ce qu’il y a des chanteurs dans le coin pour la fête de la musique ? », l’ordinateur étant censé sans doute deviner de quel « coin » il s’agit ! Il faut dire que c’est un Parisien qui a saisi la demande : il doit donc penser qu’il n’existe rien en dehors de Paris voire de son quartier…


Un individu lambda, manifestement en proie à un grand désarroi, confie à son ordinateur qu’« [il] n’aime pas la fête de la musique », cherchant le réconfort virtuel de ceux qui partageraient son opinion ; un autre, à 02h31 en ce 22 juin, sans doute excédé par des nuisances sonores tardives proclame quant à lui : « je hais la fête de la musique ». Il faut dire à leur décharge que ces personnes sont peut-être voisines de celui qui a rédigé la requête « emmerder mon voisin fête de la musique », ce qui en dit long sur le degré de perversion de certains à l’égard de leur voisinage et de l’usage détourné que certains font de la musique comme source de nuisance en un jour particulier où l’impunité leur est acquise.


C’est dans cette même logique que se développe la notion de « bruit » dans les requêtes : « peut-on faire du bruit chez soi à la fête de la musique ? », « fête de la musique bruit dehors durée », « jusqu’à quelle heure peut-on faire du bruit le jour de la fête de la musique ? », « tolérance du bruit le jour de la fête de la musique ». Il est particulièrement significatif de voir l’association des termes « musique » et « bruit », ce dernier renvoyant plutôt à la notion de nuisance. La musique, et sans doute plus encore celle du 21 juin, semble donc vécue, voire même conçue, comme une nuisance sonore par certaines personnes. Il est vrai que certains adeptes de la fête de la Musique et même certains de ses acteurs ne semblent pas concevoir cette fête autrement que comme une débauche de décibels. La musique étant conçue comme la recherche d’une harmonie, un mode d’expression fédérateur et une forme de liberté, tant pour le créateur que pour l’auditeur d’ailleurs, on peut s’étonner alors d’une telle conception négative manifestement assumée.


Comment pourrait-il d’ailleurs en être autrement quand on considère la situation des 364 autres jours de l’année ? Dès que les beaux jours reviennent, les fenêtres s’ouvrent et, avec elles, s’épanouissent la promiscuité de conversations privées qui sont exposées au grand jour et tous ces bruits divers qui viennent polluer sans vergogne notre espace idéal minimum de quiétude. Bientôt le chant délicat des oiseaux et le doux murmure de l’air cèdent le terrain aux concerts de klaxons, aux basses agressives de morceaux musicaux divers ou encore aux postes de radios et de télévisions qui permettent de profiter, sans payer la redevance, du journal de Jean-Pierre Pernaut, à la découverte de la fabrique de ronds de serviette en sapinette des Vosges de Fouchifol, ou de Plus belle la vie, le feuilleton qui fleure bon la daube provençale ! On pourrait encore signaler à la vindicte populaire le percussionniste qui anime sa batterie dans son salon non insonorisé ou encore la simili-pianiste qui utilise un instrument désaccordé depuis dix ans. Autant de bonnes raisons d’être sourd – tout comme le percussionniste d’ailleurs – ou de le devenir ! D’autant que chacun, dans un grand élan de liberté égoïste, y va de ses propres nuisances dont une part entre dans une logique guerrière… derrière leur sourire, les voisins se répondent en effet par une surenchère de nuisances sonores : à une demi-heure de zouk répondent depuis d’autres fenêtres une demi-heure de Frank Michaël ou de musique « orientale »… ou encore une demi-heure de perceuse ou un chien lâché volontairement au fond du jardin pour aboyer.


Voilà… c’était « tranche de vie banlieusarde »… que du vécu… presque trente d’années d’expérience ! En tout cas, on finit par devenir très sensible à la notion de bruit ou de musique non consentie et on a de multiples occasions de constater que la noble musique est souvent instrumentalisée à des fins peu avouables, au sein de tout un environnement sonore imposé et qui crée une sorte de fatigue auditive permanente. J’aime la nuit dans mon quartier car c’est à ce moment qu’on entend le moins de bruit ; j’aime aussi ces matins d’été irréels, lorsqu’à six ou sept heures du matin il fait jour et que tout semble encore endormi. J’aime la musique… et j’aime le silence… pas simple à concilier !


De toute façon, la seule musique qui me parle en ce moment c’est celle du cœur qui bat contre le mien, c’est celle de l’âme qui me berce de ses tendres pensées et délicates attentions.

dimanche 15 juin 2008

Décoration

Je viens de récupérer un document datant d’environ vingt ans… curieux document où j’ai commencé par contempler, non sans un certain vertige, ma photographie de l’époque… ce doit être celle du Crétacé ou bien du Jurassique au moins, bref l’époque des dinosaures ! Je suis souriant, mignon comme tout… Ce bonheur manifeste est venu me rappeler judicieusement qu’il y avait eu alors de bons moments parmi les remous. C’est étrange d’ailleurs : le hasard a fait que j’ai également revu aujourd’hui deux petits films vidéos du début des années 1990 où l’on me voit par moment : j’ai une tête d’ange au sourire radieux, au regard mystérieusement serein, à l’innocence intacte, étonnamment sage pour un enfant d’une dizaine d’années. C’est profondément troublant de se voir ainsi avec autant d’années de recul ; dans mon cas, j’ai l’impression d’être encore celui que j’étais à l’époque.

En fait, c’est surtout la dernière page du document qui a retenu mon attention ; ce qu’elle contient ne m’a jamais abandonné depuis toutes ces années écoulées et je suis heureux d’avoir tenté d’incarner ces valeurs, qui me semblent aussi universelles qu’évidentes. À l’époque, on m’offrait des médailles pour honorer mon exemplarité : cette reconnaissance, ce piédestal que l’on m’élevait au centre du temple, était particulièrement appréciable pour moi qui me trouvais alors plutôt seul au monde. Briller par mes vertus était une source relative de réconfort. J’étais un héros le mercredi après-midi… et un zéro les autres jours.

Aujourd’hui les cœurs des gens que j’aime sont autant de médailles de victoires que je porte près de mon propre coeur. J’essaie de faire vivre encore pour eux ces quelques mots merveilleux qui ont marqué ma vie.

En écrivant ces quelques lignes, mes pensées vont particulièrement vers Toi... oui Toi, ma plus belle décoration, ma Légion d’Honneur, ma Grand-Croix de l’ordre de l’Amour, Toi que je porte tout contre mon cœur à chaque instant… J’espère que ces vertus cardinales nous accompagneront tout au long de notre chemin.


lundi 9 juin 2008

Le Maroc et moi

J’ai fait le triste constat de la faible représentation du Maroc dans les causeries de ce blogounet. J’en suis rouge de honte, plus rouge encore que l’étendard du royaume alaouite.


Pourtant le Maroc n’est pas absent de ma vie, bien au contraire.


Début des années 1990…

Nos premiers souvenirs communs, si je peux dire, remontent à l’adolescence. Dans cette période difficile il y eut quelques réconforts comme le fait de contempler une belle jeune fille marocaine, amie de ma sœur, qui était reçue chez nous. J’avais donc le privilège de pouvoir, à un moment choisi par mes soins, frapper à la porte d’une chambre pour saluer notre charmante invitée, plus timide que moi encore. Il m’arrivait aussi de préparer parfois et de leur porter le goûter, histoire de voler quelques secondes supplémentaires en compagnie de la belle et d’attirer son regard et sa reconnaissance. Avec le temps, je l’ai vue devenir une femme des plus séduisantes et prendre de l’assurance. Les quelques mots que nous échangions gagnaient d’ailleurs en qualité et puis nous nous sommes enfin permis de nous saluer par la bise alors qu’auparavant une barrière invisible nous maintenait à distance. J’ai rêvé bien sûr… le rêve était la seule chose qui ne m’était pas interdite et du domaine du possible.

Je me souviens de tous ces petits gâteaux marocains délicieux dont je me délectais. Nous en étions aimablement gratifiés par la mère de cette jeune fille. J’admirais la beauté de ces petits chefs-d’œuvres périssables, conjonction de la beauté, à la fois simple et originale, et de la saveur du bon. Ah évidemment c’était l’époque où ma passion pour les baklavas ne frisait pas encore l’obsessionnel !


2002…

Puis il y eut ma rencontre sublime avec H., mon grand frère marocain, un des piliers de ma vie, rencontré dans une grande bibliothèque universitaire, un de ces temples du savoir austères où rien ne laisse supposer la moindre humanité vu que chacun s’y consacre égoïstement à ses propres humanités ! C’était en 2002 et le Maroc est devenu plus présent encore dans mon existence grâce à lui.

Ce sont des temps héroïques, ceux où il m’a sauvé la vie plus d’une fois, ne ménageant jamais sa peine pour me parler, pour m’encourager, pour m’aider à me redresser quand je perdais pieds. J’avais besoin de ta stabilité rassurante de jeune homme marié, père de famille ensuite. Tes bras n’ont jamais manqué de m’enserrer puissamment et chaleureusement dans ces moments de doute, contribuant à me redonner l’énergie nécessaire pour repartir sur les rails.

Tu m’as aussi fait un beau cadeau en me donnant un neveu et une nièce… et la famille est appelée à s’agrandir encore je le sais. Le petit D. a été le premier enfant que j’ai tenu dans mes bras, le premier qui m’a souri, le premier aussi qui a pleuré en me voyant repartir, me nouant le coeur. Si tu savais comme je t’aime mon p’tit D., combien je suis heureux d’aller te chercher à l’école avec ton papa, combien je suis ému de te voir grandir depuis trois ans et demi. Ta petit sœur commence à bien parler ; il y a peu elle est venue à moi timidement pour me dire bonjour, en m’appelant par mon prénom pour la première fois.

Tu me parles souvent de ton histoire, de ton village de l’Anti-Atlas, que je rêve de connaître, de la petite ville où tu es allé ensuite, de ta famille, ton grand-père, quasi centenaire, ton père, partagé entre la France et le Maroc, ta maman, si courageuse, ton regretté frère ou encore ta sœur au regard troublant. Cet Ailleurs me devient progressivement familier et repousse les limites de mon horizon.


2008…

De nouvelles pages à écrire pour un poème qui n’en finit pas… le beau roman d’une vie dont je veux égrainer les feuillets indéfiniment… j’en veux cent… j’en veux mille…


Le Maroc et moi – émoi – et Toi, Étoile,

Doux rêve d’où – de là bas –, ô mon Voile,

Mon Drap de soie délicat, je suis à genoux ;

À tes pieds, je dépose, mon Tendre Acajou,

Arbre bienheureux aux bras accueillants,

L’antique sabre de mes combats d’antan

Et j’invoque ta Grâce, ton ombre bénie,

Où je dirai un jour lointain adieu à la Vie.

Relève-moi, mon Cœur, ma Sève, ma Lyre :

Je t’offre des baisers au parfum de myrrhe

Et l’empreinte fidèle de mon Âme sœur.

De cet admirable jardin coloré du Bonheur,

Châsse resplendissante que l’Amour cisèle,

Cultivons ensemble chacune des parcelles.

J’y composerai pour toi mille épigrammes,

Pour que tu saches que jamais ma flamme

Pour toi ne peut s’éteindre. Pensées saintes

Et envoûtantes ! Je tremble car des enceintes

Il faut en abattre pour apprécier l’horizon :

Ainsi s’offrent à nous le Temps et ses saisons.

lundi 2 juin 2008

Confessions d’un Cadavre

Ne t’en déplaise, ton cadavre n’est pas mort ! Ton crime serait presque parfait en somme si je n’étais ce foutu cadavre un peu trop bavard… écoutez donc mes confessions !

Permis de tuer

« On parle souvent du deuxième amendement de la constitution américaine qui permet à chaque citoyen de détenir une arme. On s’attarde moins sur le fait que chacun d’entre nous, même le plus démuni, est potentiellement un danger redoutable. De quelles armes disposons nous, me direz-vous, vous qui parlez à un cadavre ? Eh bien la parole, l’indifférence, le mépris, la négligence et bien d’autres délices de ce genre encore ; autant de munitions fatales, d’objets tranchants ou contondants qui constituent l’arsenal le plus développé qui soit ; à côté de cela, le nombre de têtes nucléaires fait doucement rigoler. Si ces armes diverses et variées ne sont pas un permis de tuer accordé à tout un chacun, je ne sais pas ce qu’il vous faut ! »


Repérage d’une proie facile

« Mon tortionnaire m’a repéré assez facilement. Il faut dire que la bonté se lisait sur mon visage et se reflétait dans chacun de mes mots. Il ne lui a fallu que quelques minutes pour réaliser que j’étais la proie idéale. Il s’est approché de moi, m’a parlé gentiment, avec de grands sourires. Je me suis confié un peu à lui, évoquant quelques épisodes douloureux de ma vie ; il me répondait avec force, n’ayant d’ailleurs pas de mots assez durs contre ceux qui m’avaient blessé auparavant. Il s’apprêtait pourtant à faire de même quand je le regardais naïvement, à l’image d'une tête de bétail qui franchirait, insouciante, les portes de l’abattoir… »


L’assassinat

« Mon futur assassin connut très vite ses limites et les miennes. Il savait dès lors qu’il me tuerait et prémédita son forfait. Les premiers coups ne furent pas mortels ; il fit même mine de les avoir porté involontairement, à l’image de ceux qui tuèrent en César, incrédule, qui un père, qui un frère, qui un ami. Un coup en appelait pourtant un autre puis encore et encore jusqu’à ce que mort s’en suive, du moins c’est ce que tu pensais ! »


L’assassin en fuite

« Mon assassin prit ensuite la fuite, s’éloignant autant qu’il pouvait du lieu de son forfait. La distance lui semblait une merveilleuse échappatoire où les vagues du sang qu’il avait versé ne risqueraient pas de s’abattre sur lui. Tu m’as laissé agoniser lentement, tu m’as saigné comme on écorche le gibier, tu m’as laissé pourrir comme on laisse faisander le gibier. Personne ne pouvait songer à toi pour ce crime vu la distance qui te séparait désormais de moi. Personne n'aurait cru que derrière ton masque pour le moins angélique se cachait un de ces tueurs ordinaires aux armes si discrètes. »


Le cadavre invisible

« Moi le cadavre, on aurait dû me découvrir, supposez vous ?! Pensez donc ! Je suis un cadavre introuvable, invisible même. Il m’aurait collé dans un placard que cela n’aurait rien changé ! Car je ne suis cadavre qu’en dedans de moi. Ton crime se lit dans mon cœur, fracassé par ton silence, et dans mon âme, pulvérisée par ton manque de confiance en moi. Tu m’as détruit, oui… détraqué ma foi en toi… atomisé mes illusions… jeté mes rêves aux orties… »


Peine encourue

« Aucune peine encourue par toi puisque l’on ne peut te confondre… aucune peine donc sinon une perpétuité sans murs, ces regrets qui te poursuivront assurément et le poison des non-dits que tu crois pouvoir dissimuler indéfiniment. Mon cadavre continuera quant à lui à mourir, portant ta marque profonde au cœur. »


Ceci est une fable, bien entendu, une fable cruelle certes mais qui n’est rien d’autre que l’histoire de crimes ordinairement perpétrés contre les sentiments humains.