C’est une compagnie française, la Société de constructions des Batignolles qui reçoit la concession de cette ligne en 1876, à charge pour elle de la construire. Dès 1878 la concession passe à la Compagnie du Chemin de fer de Bône-Guelma et prolongements ; la ligne de Tunis vers l’Algérie se trouve en connexion avec le réseau algérien de cette compagnie.
Suite à une nouvelle concession accordée en 1880, le réseau de la gare française, appelée ainsi pour la distinguer de la gare italienne, – la gare du chemin de fer conduisant à La Goulette et La Marsa –, s’étoffe en 1882 d’un tronçon sud de 16 kilomètres reliant Tunis à Hammam-Lif, dont le développement en tant que ville de plaisance – résidence beylicale, établissements thermaux, plages, casino, … – mais aussi ville industrielle se trouve ainsi conforté. C’est le départ du développement du réseau ferré vers le sud tunisien, un réseau qui atteint quasiment son extension maximale dès les années 1920, soit en une quarantaine d’années. Il comporte pour l’essentiel une ligne nord sud de Tunis à Sfax ainsi que des lignes transversales de Tunis à Tebessa et de Tunis à Henchir-Souatir via Sousse. En 1922, l’État tunisien rachète les lignes du réseau construites par la Compagnie du Chemin de fer de Bône-Guelma, qui s’ajoutent ainsi aux lignes financées par l’État lui-même. L’ensemble du réseau est confié pour exploitation à la Compagnie fermière des chemins de fer tunisiens (CFT) et il atteindra une extension de 1710 kilomètres en 1949, peu avant la reprise de sa gestion directe par l’État tunisien, en 1956, avec la création de la Société nationale des Chemins de fer tunisiens (SNCFT).
Si l’emplacement de la gare et de ses infrastructures est resté sensiblement le même, la physionomie de l’ensemble a considérablement évolué, particulièrement après la décision en 1969 de rénover l’ensemble des installations, ce qui est réalisé dans le courant des années 1970. Aujourd’hui la gare de Tunis se trouve au fond de la place de Barcelone. Elle est constituée d’un vaste bâtiment rectangulaire qui ouvre sur neuf quais, partiellement abrités, établis en arrière de la gare. Auparavant la place de Barcelone n’existait pas : elle était occupée par les voies de service de la gare ainsi que par divers bâtiments annexes de la gare. En outre le bâtiment principal de la gare française ne se trouvait pas dans le prolongement des quais mais les bordait à l’ouest. Le bâtiment principal de l’ancienne gare, détruite dans les années 1970, était constitué d’un corps principal de deux niveaux encadré de deux ailes d’un seul niveau. Son architecture était extrêmement simple et dépourvue d’ornements, hormis quelques frises et ornements métalliques ; un auvent était fixé au dessus de l’entrée de la gare. Quoiqu’il en soit on était bien loin avec cette gare française de Tunis de la monumentalité de la gare de Bizerte (1894) ou encore des impressionnantes gares couvertes – à Tunis et La Goulette – du chemin de fer de Tunis à La Goulette et La Marsa, construit entre 1871 et 1872.
On accédait à la gare française de Tunis par une place comportant un square, encadrée d’immeubles et desservie à l’ouest par la rue d’Algérie. Au milieu de la place de la gare fut élevé en 1914 un monument en l’honneur de Philippe Thomas (1843-1910), le vétérinaire et géologue à l’origine de la découverte des gisements de phosphate du centre-ouest tunisien.
La gare de Tunis possède un réseau mixte de voies : des voies à écartement normal (1,44 mètre) pour les lignes desservant le nord et nord-ouest tunisien ; des voies à écartement métrique (un mètre) pour les lignes desservant le sud tunisien. Cette distinction tient à l’histoire du réseau ferroviaire tunisien : les lignes de Sfax à Gabès et Gafsa, dont la construction a été concédée à la Compagnie des Phosphates et du Chemin de fer de Gafsa ont été réalisée de 1896 à 1898 en écartement métrique ; il a été décidé par la suite que les lignes partant de Tunis vers le sud seraient sur ce même standard, ceci afin de favoriser la connexion des deux réseaux, à Sfax et à Henchir Souatir et de favoriser ainsi les échanges économiques à l’intérieur même de la Tunisie, particulièrement l’acheminement des matières premières vers les ports tunisiens plutôt que vers ceux de l’Algérie voisine.
9 commentaires:
Merci à l'historien en chef de la blogosphère pour ce résumé succinct de notre cher gare de tunis :) C'est intéressant de voir son évolution au cours du temps!
Enfaite elle me rappelle de déchirantes séparations avec un être qui m'était cher à l'époque. C'est marrant comme il suffit d'un détail ou d'une simple allusion à un lieu pour faire remonter à la surface de lointains souvenirs que l'on croyait enfouis à jamais au fond de notre mémoire...
@anonyme : merci pour ce témoignage plein de coeur. Les gares sont effectivement des endroits où notre mémoire est souvent durement mise à l'épreuve et l'on se souvient curieusement plus de ces fameuses déchirantes séparations que des phases d'accueil réjouissantes qui les précèdent pourtant. Encore un mystère... :)
c'est quoi ton histoire avec les gares roumi? :D
merci encore pour cette histoire !
@h&m : moi ? une histoire avec les gares ?! :p Oh mince, je suis repéré. :p
Eh bien écoute je crois que c'est quasi génétique. J'ai des ancêtres qui ont été dans les chemins de fer. Je ne les ai pas connus mais enfin il semblerait qu'ils aient eu de l'effet sur moi. :)
J'ai toujours été passionné par les chemins de fer, sous tous leurs aspects : le matériel roulant, la signalisation, le développement des voies, les gares et leur architecture, ... bref je ne m'ennuie pas et je suis très heureux d'avoir cette passion en dehors de mes activités habituelles. :)
Il me semble aussi que les chemins de fer sont un formidable appel au rêve, au voyage, à l'exaltation des tréfonds de l'âme humaine à travers les dimensions de retrouvaille et/ou de séparation, de rapprochement et/ou d'éloignement, bref tout ce qui est intimement lié aux trains ou aux gares.
Il y a de l'émotion, de la poésie... cela me touche beaucoup et me conduit à souvent parler ici même des gares et trains, que ce soit en termes techniques, historiques ou plus sentimentaux, selon le moment.
Bravo amigo encore un chef d'oeuvre que tu ns offre!
Cette mm gare va égalemnt sur Ben Arous.... ki me fait pousser des cheveux blancs et mon livre pietine !
As-tu des infos stp sur:
--LA VILLE DE BEN AROUS
--et sur SIDI BEN AROUS
MERCI AMIGO
@++++
rached
@el greco : hola Rached ! merci pour tes compliments. Eh oui c'est bien la gare pour aller à Ben Arous. :)
Pour le reste, je t'envoie un mail.
Bonjour Roumi, merci pour tous ces beaux souvenirs et ces magnifiques photos.
je ne sais pas si mon message vous serait transmis (la dernière discussion date de 2008 :) ).
je suis architecte et je travaille sur les ambiances architecturales et urbaines plus particulièrement les ambiances sonores. en fait je m'intéresse aux ambiances de la première gare de Tunis (avant renouvellement aux années 70), donc je voulais savoir si vous avez d'autres choses à me faire découvrir sur cette époque passée.
Bonjour Chiraz. Je suis désolé mais je n'ai pas d'autres documents plus précis concernant la gare.
Ce que l'on peut dire de l'ambiance sonore c'est, notamment à partir des photos ou cartes postales anciennes qu'il y avait sur la place devant la gare une sorte d'esplanade où les voyageurs pouvaient emprunter des fiacres puis des automobiles ; devant cette esplanade se trouvait le square avec la statue de Philippe Thomas et on peut imaginer qu'il y avait des gens qui se promenaient dans le square, des enfant qui jouaient, ... autour de ce square il y avait notamment un hôtel (le Nouvel Hôtel) et probablement des commerces et des établissements pour se restaurer. A l'intérieur de la gare, sur les quais, le bruit des trains à vapeur... Difficile d'en dire plus ! :)
Merci pour les données importantes puis-je avoir une photo claire et détaillée de la gare du sud
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