mardi 9 septembre 2008

Et si on parlait un peu du Kef…

Quand un écrivain du genre de Paolo Coehlo sort un nouveau pavé, tout les bloggeurs tunisiens en parlent sur leurs blogs ; bon j’exagère… mais à peine ! En revanche, quand il s’agit de présenter des ouvrages relatifs au patrimoine tunisien, il y a déjà moins de monde et c’est pire encore quand cela concerne une ville du nord-ouest tunisien !


Un non Tunisien finirait bien par croire que ce pays est désertique, hormis le littoral entre Bizerte et Jerba ! Quant aux Tunisiens, la peste du régionalisme, autrement appelée xénophobie appliquée à ses propres concitoyens, fait souvent des ravages parmi eux. Plutôt que d'épiloguer sur ce douloureux sujet, essayons plutôt de contribuer à détruire ces mauvais procédés en évoquant tant qu’on le pourra ces belles terres, si injustement méprisées, des environs du Kef, Jendouba et Béja.


Le livre de Camille Mifort, Vivre au Kef quand la Tunisie était française, paru au début de l’année 2008, est une heureuse contribution en ce sens. Il se propose d’évoquer la vie des Keffois durant la période allant de la conquête française, en 1881, jusqu’à l’indépendance, en 1956 ; l’ouvrage s’achève en fait par l’évocation de la période 1956-1962, marquée tant par les soubresauts de la décolonisation progressive en Tunisie que par ceux du conflit voisin franco-algérien.


Le Kef est présenté par le biais d’écrits de savants des XIXe et XXe siècles mêlés aux témoignages d’anciens habitants de la ville. Le tout est agrémenté d’une riche documentation iconographique : cartes postales anciennes, photographies et gravures. Le livre est suffisamment captivant pour se lire d’une traite ; quant aux illustrations, elles peuvent donner lieu à de longues observations, à l’affût de détails significatifs, par exemple l’architecture ou encore les pratiques vestimentaires. On regrettera cependant que la documentation iconographique ne soit pas mieux mise en valeur par des légendes descriptives et par un essai de datation, même approximatif, des clichés photographiques et gravures, cette démarche pouvant permettre de mesurer visuellement une part des évolutions du site et contribuant à l’appréhension dynamique de l’Histoire. Il manque également un plan du Kef avec le nom ancien des rues pour faciliter la compréhension des textes et la lecture des illustrations.


Les témoignages recueillis couvrent une bonne partie de la période considérée par le biais de récits de témoins directs ou transmis à ces témoins par leurs aïeux. Comme pour les illustrations, on pourra déplorer l’absence de précisions sur ces sources orales : nom de l’interviewé, indication de son origine sociale, datation approximative des faits relatés ou tout autre information utile permettant d’apprécier un peu plus encore la portée d’un témoignage. Cela étant dit, la curiosité est tout de même bien satisfaite par ces récits, très vivants et très évocateurs de ce que fut la période du protectorat français au Kef.


Le mérite de ce livre, même s’il semble s’appuyer pour l’essentiel sur le témoignage des Keffois d’origine française ou italienne ainsi que de Keffois tunisiens juifs, est de parvenir à une esquisse suggestive de la vie de l’ensemble de la population. Les récits oscillent entre nostalgie d’un bonheur perdu et lucidité sur un espace clair-obscur marqué par les inégalités sociales et les limites de la tolérance et de la compréhension des uns envers les autres. À l’ombre immuable de la Kasbah et des remparts de la médina, les rares enfants tunisiens alors scolarisés suivaient les cours d’histoire française où « leurs ancêtres étaient gaulois », les Français et les Italiens vivaient leurs rapports au rythme de l’histoire politique agitée des deux métropoles, et le quartier juif était parfois mis à sac par des Keffois musulmans.


L’évocation de la seconde guerre mondiale montre comment les bonnes fortunes se faisaient et se défaisaient en peu de temps, à l’exemple de ces Italiens keffois soudainement valorisés par la victoire italo-allemande de 1940 puis déportés en Algérie suite à la Campagne de Tunisie qui ruinait leurs espoirs d’une Tunisie italienne plutôt que française. Ces espérances rendues vaines n’étaient que le prémice de maux plus rudes, à l’épreuve de la décolonisation, marquée par des drames ayant endeuillés chacune des communautés. Si une part de tragique émane donc de l’ouvrage de Camille Mifort, il se dégage aussi un fort sentiment d’humanité car, malgré leur coexistence dans un contexte qui était on ne peut plus fragile et porteur de sa propre perte, les diverses communautés du Kef savaient parfois se rapprocher, le temps de fêtes vécues dans la joie collective ou par la grâce de liens d’exceptions noués au-delà des différences et des différends et qui n’ont sans doute été brisés que par la mort, non par le temps et la distance.


La promenade dans les rues anciennes du Kef, alors important pôle administratif et commercial et place militaire stratégique, est donc bien plus que la simple évocation des éléments les plus significatifs du paysage urbain ancien, notamment les divers quartiers communautaires, les bâtiments publics, religieux et militaires ou encore les rues, places, fontaines et lavoir. C’est une invitation à la réflexion sur une époque et ses ambiguïtés, sur l’ambivalence humaine face aux épreuves de la vie. Ce temps nous interpelle ! Abreuvons-nous en alors à Ras el Aïn, la source de l’antique Sicca Veneria où les néguels venaient avec leurs ânes puiser l’eau pure partagée par tous les Keffois.


Camille Mifort, Vivre au Kef quand la Tunisie était française, MC - Éditions, 2008 (ISBN 978-9973-807-76-2).


13 commentaires:

Anonyme a dit…

Ce livre semble fort intéressant! merci pour ta description. Le Kef est un ptit coin de la Tunisie qui regorge de beauté et de charme mais qui demeure inconnu pour beaucoup de personnes.
Je TE file ce lien:http://lekef-carte.postale.chez-alice.fr/
enjoy ;)

Roumi a dit…

@princesstanit : merci pour ton message. En fait je connais le site dont tu as indiqué le lien : il est également l'oeuvre de l'auteur du livre ! Le site internet et le livre se complètent bien ; on peut donc effectivement recommander la consultation des deux.

ulyssen a dit…

exellent ton post cher ami, ca donne envie de le lire se livre ^^

Roumi a dit…

@ulyssen : merci mon cher Habib. :)
Je suppose que ce livre est encore disponible à Tunis ; moi je l'ai trouvé sur internet en fait.

Sinon j'ai une idée ; je vais lancer une grande rumeur... donc tout Tunisien atteint du syndrome régionaliste qui se rendrait au Kef en répétant mille fois sur le chemin "je ne dirai plus de mal des KGBiens" et qui accepterait de faire le tour de cette ville à dos d'âne avec le panneau "c'est moi l'âne" se verra remettre le livre sur le Kef gratuitement ! :p

Anonyme a dit…

Merci pour l'idée de la présentation du livre.
Quant aux préjugés régionalistes, ils sont le produit d'une régression culturelle d'une minorité de crétins incultes, il faut donc s'adresser à un autre public, car eux, ils n'ont pas de contact avec les livres.

Roumi a dit…

@keffois : merci. Bon j'espère quand même que quelques régionalistes me liront ! :)

Camille56 a dit…

De l'auteur au blogger:
Merci pour ce très beau texte. Vos commentaires reflètent tout à fait ce que je voulais apporter au lecteur. Revivre l'ambiance au Kef, dans une petite ville de l'intérieur où les habitants, Européens comme Tunisiens se sentaient keffois. Beaucoup de familles européennes y ont d'ailleurs vécu plusieurs générations.
Pour répondre à vos quelques réserves, le choix de l'anonymat des sources (meme si elles sont toutes mentionnées dans les Remerciements) était volontaire afin d'alléger le texte. Pour recréer l'ambiance, il était nécessaire de "mélanger" les souvenirs de plusieurs témoins pour donner le sentiment d'un témoignage unique. Et beaucoup de faits m'ont été rapportés par plusieurs personnes.
L'absence de datation des images est en effet regrettable mais rajouter une légende retirait de la force à l'image. Vous pouvez aller sur mon site www.elkef.info où toutes les cartes sont datées.
Quant à l'absence d'une carte du Kef, c'est volontaire même si l'éditeur me l'avait également suggéré. J'invite le lecteur à faire ce que j'ai fait, partir à la découverte de toutes ces veilles rues et les redécouvrir grâce à ces vieilles images.
Le Kef mérite d'y passer quelques jours à l'explorer à la recherche de ses trésors cachés. Et vous aurez la surprise de vous apercevoir que ces endroits photographiés il y a un siècle existent toujours!
Un dernier mot. Peu de Tunisiens ont témoigné comme vous le remarquez. J'aimerais que des jeunes Tunisiens prennent le relais de ce que j'ai fait. Il est important de garder cette mémoire et les témoins disparaissent les uns après les autres avec leurs souvenirs irremplaçables. Et c'est une partie de l'Histoire de la Tunisie qui part avec eux.
Camille MIFORT

Roumi a dit…

@camille56 : bonjour et merci pour toutes ces indications.

Pour ce qui est des jeunes Tunisien il faut effectivement souligner la nécessité de leur mobilisation pour valoriser le patrimoine historique, qu'il soit matériel ou immatériel. Ceux qui s'impliquent dans ce type de démarche sont encore trop rares et généralement isolés dans leurs démarches. Il est vrai que certaines démarches comme l'analyse des données recueillies peut demander certaines compétences que l'on ne possède pas forcément mais la simple collecte des témoignages est déjà un exercice fondamental, un préalable indispensable qui est à la portée de toutes les bonnes volontés. Il suffit de s'adresser pour cela à ses proches, ses voisins, ... ; c'est déjà une bonne approche pour percevoir l'intérêt de ce patrimoine partiellement immatériel. C'est aussi une approche qui ne demande que peu de moyens par rapport, par exemple, à la collecte de documents anciens parfois très onéreux. Voilà donc évidemment on encourage tous les jeunes Tunisiens a être curieux de ce qui les entourent, à se poser des questions sur le passé et chercher des débuts de réponses auprès des anciens, à consigner ces récits puis à les confronter pour en tirer des constats plus globaux sur une époque, sur un lieu, ... Il faut aussi encourager les jeunes universitaires à s'impliquer dans des projets communs de nature historique, qu'ils ont naturellement vocation à encadrer. Enfin il faut encourager la conjugaison des énergies et des approches, l'idéal étant que les Tunisiens puissent dans ce domaine travailler conjointement avec des gens venus de France, d'Italie, ... Que l'écriture de cette histoire partagée soit l'occasion de nouveaux partages, bien meilleurs encore que les précédents !

kefi a dit…

j'ai déja une idée sur le livre.il est disponible au kef mais je ne l'ai pas encore lu.le titre pose probléme.quand la tunisie était FRANCAISE!!!l'as-t-elle était un jour ??? d'autant plus que tous ces européens se disent KEFOIS!!!

Roumi a dit…

@kefi :
Un livre est fait justement pour nous sortir de nos idées préconçues en général donc mieux vaut ne pas le lire si on pense savoir d'emblée ce que l'on va y trouver.

Pour ma part, je ne vois pas en quoi le titre poserait problème. Au contraire, dire que la Tunisie a été française est assez explicite et correspond bien à une période de 75 années qui a débuté par une conquête militaire et s'est caractérisée par la prise en main politique, administrative et économique du pays ainsi que par l'installation de colons en nombre relativement significatif. Le système retenu a été celui du Protectorat qui laisse objectivement une faible marge d'autonomie au pays occupé et qui permet à la puissance occupante d'entretenir la fiction d'une relation plus ou moins d'égal à égal avec le pays occupé. Quand je lis que la Tunisie n'aurait pas été française cela me rappelle finalement des discours français de l'époque du Protectorat qui disent exactement la même chose, vantant les mérites de l'harmonie des relations entre France et Tunisie, considérant qu'il y a bel et bien deux entités qui consentent librement à collaborer, s'entraider, ... Dire que la Tunisie n'aurait pas été française cela serait digne d'un discours du Résident général soulignant qu'il n'était "que" ministre des Affaires Etrangères du Bey. Parler de la Tunisie française, c'est reconnaître l'assujetissement du pays par la France à cette époque, ce qui fut le cas, ce qu'il faut reconnaître, ce dont il faut se souvenir entre autres choses, au milieu de bien d'autres faits de l'histoire tunisienne, des faits souvent similaires puisque la Tunisie est une terre de colonisation depuis l'antiquité.

Quant au fait que des Européens se disent keffois c'est tout à fait logique et légitime parce que l'essprit humaine fait que pour se dire Keffois, Tunisois, Parisien ou je ne sais quoi d'autre, il n'est pas nécessaire d'y être né ou d'y avoir des ancêtres sur trois, dix ou vingt-cinq générations ; d'ailleurs parmi ceux qui répondraient à ces critères, on en trouverait qui ne se sentiraient pas Keffois, Tunisois ou Parisiens pour autant. L'esprit humain n'est pas formaté ; on se sent attaché à des lieux pour des raisons personnelles.
Maintenant il faut aussi penser que si les premiers Européens du Kef étaient des colons, leurs enfants étaient des Keffois de naissance et donc attachés à la terre qui les avait vus naître, au même titre que les enfants du même âge issus des autochtones. Certains n'ont même pas connu d'autre terre et notamment la terre de leur origine européenne.
Il faut bien penser à toutes ces logiques et ne pas se faire une idée trop réduite et simpliste de la notion d'appartenance à une terre. Chacun se sent lié ou non à une origine pour des raisons diverses et nos raisons pour le revendiquer ne sont ni meilleures ni pires que celles des autres.
En outre, il faut bien aussi se souvenir qu'il n'est pas convenable de traiter les Européens séparément d'une longue chaîne de peuplement. La Tunisie est une terre de brassage des populations et des cultures. La population s'est formée par le biais de mouvements de population, d'échanges et de mélanges. Certains apports l'ont été par la conquête, par une forme de contrainte donc, quand d'autres étaient plus apaisés. Quand les Arabes sont arrivés au Kef, ils étaient aussi des colons, arrivés selon une logique tout aussi impérialiste que notamment les Français après eux ou les Romains avant eux.
Si l'on devait se placer du point de vue des "arabes" keffois contestant aux Européens le droit de se revendiquer keffois, on pourrait se placer du point de vue des Keffois qui ont eux-mêmes vu arriver les Arabes et qui ne devaient absolument pas les considérer comme Keffois.
Comme on le voit, ce genre d'interrogation n'a pas de sens car chacun a des origines diverses qui le mettent à la fois dans la catégorie des autochtones d'une certaine époque et des colons d'une autre époque. Il faut donc traiter toute la chaîne historique selon la même logique !
Ce n'est ni le temps ni les ancêtres ni forcément la naissance qui nous enracinent dans un lieu mais le fait qu'on y établissse nos activités ou notre résidence ou tout autre motif personnel qui nous donne l'amour pour un lieu.

Camille56 a dit…

Cher roumi
Je suis entièrement d'accord avec votre dernier mot en réponse à l'interrogation de kefi. Il n'y a rien à retrancher ni à rajouter.
Lors de la parution du livre, j'ai été très étonné de la réaction mi-surprise, mi-scandalisée des Tunisiens quand ils découvraient le titre du livre. La lecture des livres de l'époque nous enseigne pourtant que si, en 1881, la France a fait de la Tunisie un Protectorat et non une Colonie, c'est UNIQUEMENT pour s'assurer que tous les frais dûs à la Colonisation seraient réglés par le budget tunisien et non par le budget français. Cela permettait aussi de dire que c'était au gouvernement beylical de s'occuper du prélèvement des impôts des Tunisiens et non aux fonctionnaires français.
Mais le Traité de la Marsa précise que le Bey s'engage à signer TOUS les textes proposés par le Résident français et seulement ces textes là. Autant dire que la marge de maneuvre du Bey est nulle. Et si il désobéit, on le détrône. Voir Moncef Bey.
50 ans après l'Indépendance, il est fascinant de voir que cette imposture fonctionne toujours. Et que les Tunisiens s'imaginent encore qu'ils ont été indépendants entre 1881 et 1956.
Faut-il y voir une certaine forme de fierté nationale?
Quant à l'interrogation de Kefi sur l'identité keffoise des anciens Européens, qu'il demande aux vieux Keffois tunisiens ce qu'ils en pensent. Il sera surpris de la réponse.

Roumi a dit…

L'enseignement de l'histoire aux Tunisiens est en grande partie pollué par des considérations idéologiques depuis l'Indépendance, avec construction progressive d'un cadre identitaire répondant aux attentes de l'Etat contemporain. C'est évidemment le cas dans chaque Etat même si c'est à plus ou moins grande échelle. On peut dire que cette démarche est extrême en Tunisie, qu'elle n'est pratiquement contrebalancée par rien et qu'elle produit des effets désastreux.

A ce propos il convient de lire notamment Entre Bourguiba et Hannibal, Identité et histoire tunisienne depuis l'indépendance, la thèse de Driss Abbassi parue chez Karthala en 2005.

Dans ces conditions, l'histoire telle qu'elle est actuellement enseignée en Tunisie, y compris parfois à haut niveau, est souvent marquée par des positions extrêmement tranchées, sans la moindre nuances. Cela tient à au moins trois facteurs.

Le premier facteur est que l'art de la nuance se développe dans une société qui peut débattre de tout de manière sereine. A défaut, on se contente de confronter des opinions monolithiques et c'est dommageable tant pour l'appréhension de l'Histoire que pour tout le reste de notre vie sociale.

Le deuxième facteur est le sérieux manque de rigueur et la difficulté à apprécier la pertinence d'un propos à vocation scientifique, culturelle, ... En effet, le moindre discours rédigé avec une vague apparence soignée et quelques idées indigentes devient rapidement un discours des plus brillants et pertinents, sans qu'aucune réserve ne soit émise. Je prendrai simplement pour illustrer ce phénomène les critiques souvent dithyrambiques qui sont faites dans la presse tunisienne à propos des livres consacrés au patrimoine et/ou à l'histoire tunisienne. On n'y trouve généralement nulle critique ; c'est toujours parfait, d'autant plus quand on recopie la quatrième de couverture ou des extraits du livre commenté à défaut de savoir synthétiser convenablement ce que l'on lit... C'est aussi toujours une bonne occasion pour un couplet nationaliste, ce dernier étant en fait le véritable prétexte de l'article. Il faut toujours qu'il soit question de fierté d'être tunisien, de gratitude et de devoir accompli à l'égard de son pays, de sa région ou de sa ville natale, ... Il est évidemment que de telles motivations sont en contradiction avec la démarche historique qui doit tendre vers une analyse neutre et dont le but et l'instruction et non la flatterie.

Le troisième facteur tient aux contingences idéologiques qui guident trop souvent les recherches historiques en Tunisie. On en vient à analyser différemment des faits découlant de la même logique sous prétexte qu'il ne s'agit pas de la même époque et pas des mêmes personnes impliquées. Il est par exemple quasiment impossible de faire comprendre à un Tunisien que les Carthaginois étaient des colonisateurs au même titre que leurs "ennemis" romains et il est tout aussi difficile de l'inciter à tenir compte de la nature coloniale de la présence arabe au Maghreb dans le cadre de réflexions historiques plus globales. De la même façon les Tunisiens diront souvent tout le mal qu'ils pensent de l'époque beylicale mais si on leur parle de la relative jeunesse de l'Etat tunisien ils n'hésiteront pas à vanter les grandes réformes beylicales du XIXe siècle, passant ainsi brutalement du tout négatif au tout positif, alors qu'une analyse d'emblée modérée serait préférable et éviterait ce genre de grand écart.

Il résulte de tout cela une espèce d'embrouillamini historique qui supporte mal les regards originaux, les idées plus subtiles voire la contradiction. Cette démarche historique biaisée est en outre à l'opposé des conceptions éthiques de cette discipline qui nous invite plutôt à mettre en place une méthode d'analyse cohérente et tendant à l'objectivité, à s'affranchir le plus possible des considérations personnelles ou collectives.

chennoufi a dit…

dans le cadre de la tendance touristique actuelle de donner un label à chaque région de la Tunisie est il possible de voir ensemble la possibilité de trouver un label pour la région du kef .
ce label devant permettre à cette région une meilleure visibilté de son patrimoine naturel et historique et s inscrire dans le cadre d un tourisme valorisant:le tourisme culturel et l écotourisme qui outre les retombées économiques qu il suscite il a la particularité de protéger le patrimoine .